波德莱尔 (Charles Baudelaire)

Le balcon 阳台  Les Chats 猫  Tristesse de la lune 月亮的哀愁  L'homme et la mer 人与海  La chevelure 头发  La destruction 毁灭  Harmonie du soir 黄昏的和谐  Paysage 风景  Bénédiction 祝福  Chant d'automne 秋歌  Parfum exotique 异域的芳香 


Le balcon 阳台

Le balcon

Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses,
O toi, tous mes plaisirs! ô toi, tous mes devoirs!
Tu te rappelleras la beauté des caresses,
La douceur du foyer et le charme des soirs,
Mère des souvenirs, maîtresse des maîtresses!

Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon,
Et les soirs au balcon, voilés de vapeurs roses.
Que ton sein m'était doux! que ton cœur m'était bon!
Nous avons dit souvent d'impérissables choses
Les soirs illuminés par l'ardeur du charbon.

Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées!
Que l'espace est profond! que le cœur est puissant!
En me penchant vers toi, reine des adorées,
Je croyais respirer le parfum de ton sang.
Que les soleils sont beaux dans les chaudes soirées!

La nuit s'épaississait ainsi qu'une cloison,
Et mes yeux dans le noir devinaient tes prunelles,
Et je buvais ton souffle, ô douceur! ô poison!
Et tes pieds s'endormaient dans mes mains fraternelles.
La nuit s'épaississait ainsi qu'une cloison.

Je sais l'art d'évoquer les minutes heureuses,
Et revis mon passé blotti dans tes genoux.
Car à quoi bon chercher tes beautés langoureuses
Ailleurs qu'en ton cher corps et qu'en ton cœur si doux?
Je sais l'art d'évoquer les minutes heureuses!

Ces serments, ces parfums, ces baisers infinis,
Renaîtront-ils d'un gouffre interdit à nos sondes,
Comme montent au ciel les soleils rajeunis
Après s'être lavés au fond des mers profondes?
- O serments! ô parfums! ô baisers infinis!

阳台

我的回忆之母,情人中的情人,
我全部的快乐,我全部的敬意!
你呀,你可曾记得抚爱之温存,
那炉边的温馨,那黄昏的魅力,
我的回忆之母,情人中的情人!

那些傍晚,有熊熊的炭火映照,
阳台上的黄昏,玫瑰色的氤氲。
你的乳房多温暖,你的心多好!
我们常把些不朽的事情谈论。
那些傍晚,有熊熊的炭火映照。

温暖的黄昏里阳光多么美丽!
宇宙多么深邃,心灵多么坚强!
我崇拜的女王,当我俯身向你,
我好像闻到你的血液的芳香,
温暖的黄昏里阳光多么美丽!

夜色转浓,仿佛隔板慢慢关好,
暗中我的眼睛猜到你的眼睛,
我啜饮你的气息,蜜糖啊毒药!
你的脚在我友爱的手中入梦。
夜色转浓,仿佛隔板慢慢关好。

我知道怎样召回幸福的时辰,
蜷缩在你的膝间,我重温过去。
因为呀,你慵倦的美哪里去寻,
除了你温存的心,可爱的身躯?
我知道怎样召回幸福的时辰。

那些盟誓、芬芳、无休止的亲吻,
可会复生于不可测知的深渊,
就像在深邃的海底沐浴干净、
重获青春的太阳又升上青天?
那些盟誓、芬芳、无休止的亲吻。

郭宏安译


Les Chats 猫

Les Chats

Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également, dans leur mûre saison,
Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,
Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires.

Amis de la science et de la volupté,
Ils cherchent le silence et l'horreur des ténèbres;
L'Èrèbe les eût pris pour ses coursiers funèbres,
S'ils pouvaient au servage incliner leur fierté.

Ils prennent en songeant les nobles attitudes
Des grands sphinx allongés au fond des solitudes,
Qui semblent s'endormir dans un rêve sans fin;

Leurs reins féconds sont pleins d'étincelles magiques,
Et des parcelles d'or, ainsi qu'un sable fin,
Ètoilent vaguement leurs prunelles mystiques.

猫

严肃的学者,还有热烈的情侣,
在其成熟的季节都同样喜好
强壮又温柔的猫,家室的骄傲,
像他们一样地怕冷,简出深居。

它们是科学、也是情欲的友伴,
寻觅幽静,也寻觅黑夜的恐惧;
黑暗会拿来当作音乐的坐骑,
假使它们能把骄傲供认驱遣。

它们沉思冥想,那高贵的姿态
像卧在僻静处的大狮身女怪,
仿佛沉睡在无穷无尽的梦里;

丰腴的腰间一片神奇的光芒,
金子的碎片,还有细细的沙粒
又使神秘的眸闪出朦胧星光。

郭宏安译


Tristesse de la lune 月亮的哀愁

Tristesse de la lune

Ce soir, la lune rêve avec plus de paresse;
Ainsi qu'une beauté, sur de nombreux coussins,
Qui d'une main distraite et légère caresse
Avant de s'endormir le contour de ses seins,

Sur le dos satiné des molles avalanches,
Mourante, elle se livre aux longues pâmoisons,
Et promène ses yeux sur les visions blanches
Qui montent dans l'azur comme des floraisons.

Quand parfois sur ce globe, en sa langueur oisive,
Elle laisse filer une larme furtive,
Un poëte pieux, ennemi du sommeil,

Dans le creux de sa main prend cette larme pâle,
Aux reflets irisés comme un fragment d'opale,
Et la met dans son cœur loin des yeux du sommeil.

月亮的哀愁

今夜,月亮进入无限慵懒的梦中,
像在重叠的垫褥上躺着的美人,
在入寐以前,用她的手,漫不经心
轻轻将自己乳房的轮廓抚弄,

在雪崩似的绵软的缎子背上,
月亮奄奄一息地耽于昏厥状态,
她的眼睛眺望那如同百花盛开
向蓝天里袅袅上升的白色幻象。

有时,当她感到懒洋洋无事可为,
给地球上滴下一滴悄悄的眼泪,
一位虔诚的诗人,厌恶睡眠之士,

就把这一滴像猫眼石碎片一样
闪着红光的苍白眼泪收进手掌,
放进远离太阳眼睛的他的心里。

钱春绮译


L'homme et la mer 人与海

L'homme et la mer

Homme libre, toujours tu chériras la mer !
La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme
Dans le déroulement infini de sa lame,
Et ton esprit n'est pas un gouffre moins amer.

Tu te plais à plonger au sein de ton image ;
Tu l'embrasses des yeux et des bras, et ton coeur
Se distrait quelquefois de sa propre rumeur
Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.

Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets :
Homme, nul n'a sondé le fond de tes abîmes ;
Ô mer, nul ne connaît tes richesses intimes,
Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets !

Et cependant voilà des siècles innombrables
Que vous vous combattez sans pitié ni remord,
Tellement vous aimez le carnage et la mort,
Ô lutteurs éternels, ô frères implacables !

人与海

自由的人,你将永把大海爱恋!
海是你的镜子,你在波涛无尽,
奔涌无限之中静观你的灵魂,
你的精神是同样痛苦的深渊,

你喜欢沉浸在你的形象之中;
你用眼用手臂拥抱它,你的心
面对这粗野,狂放不羁的呻吟,
有时倒可以派遣自己的骚动.

你们两个都是阴郁而又谨慎:
人啊,无人探过你的深渊之底;
海啊,无人知道你深藏的财富,
你们把秘密保守得如此小心!

然而,不知过了多少个世纪,
你们不怜悯,不悔恨,斗狠争强,
你们那样地喜欢残杀和死亡,
啊,永远的斗士,啊,无情的兄弟!

郭宏安译


La chevelure 头发

La chevelure

Ô toison, moutonnant jusque sur l'encolure !
Ô boucles ! Ô parfum chargé de nonchaloir !
Extase ! Pour peupler ce soir l'alcôve obscure
Des souvenirs dormant dans cette chevelure,
Je la veux agiter dans l'air comme un mouchoir !

La langoureuse Asie et la brûlante Afrique,
Tout un monde lointain, absent, presque défunt,
Vit dans tes profondeurs, forêt aromatique !
Comme d'autres esprits voguent sur la musique,
Le mien, ô mon amour ! nage sur ton parfum.

J'irai là-bas où l'arbre et l'homme, pleins de sève,
Se pâment longuement sous l'ardeur des climats ;
Fortes tresses, soyez la houle qui m'enlève !
Tu contiens, mer d'ébène, un éblouissant rêve
De voiles, de rameurs, de flammes et de mâts :

Un port retentissant où mon âme peut boire
A grands flots le parfum, le son et la couleur ;
Où les vaisseaux, glissant dans l'or et dans la moire,
Ouvrent leurs vastes bras pour embrasser la gloire
D'un ciel pur où frémit l'éternelle chaleur.

Je plongerai ma tête amoureuse d'ivresse
Dans ce noir océan où l'autre est enfermé ;
Et mon esprit subtil que le roulis caresse
Saura vous retrouver, ô féconde paresse,
Infinis bercements du loisir embaumé !

Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues,
Vous me rendez l'azur du ciel immense et rond ;
Sur les bords duvetés de vos mèches tordues
Je m'enivre ardemment des senteurs confondues
De l'huile de coco, du musc et du goudron.

Longtemps ! toujours ! ma main dans ta crinière lourde
Sèmera le rubis, la perle et le saphir,
Afin qu'à mon désir tu ne sois jamais sourde !
N'es-tu pas l'oasis où je rêve, et la gourde
Où je hume à longs traits le vin du souvenir ?

头发

哦,浓密的头发直滚到脖子上!
哦,发卷,哦,充满慵懒的香气!
销魂!为了今晚使阴暗的卧房
让沉睡在头发中的回忆往上,
我把它像手帕般在空中摇曳。

懒洋洋的亚洲,火辣辣的非洲,
一个世界,遥远,消失,几乎死亡,
这芳香的森林在你深处居留!
像别人的精神在音乐上飘游,
爱人!我的精神在香气中荡漾。

我将去那边,树和人精力旺盛,
都在赤日炎炎中长久地痴迷;
粗大的发辫,请做载我的浪峰!
乌木色的海,你容纳眩目的梦,
那里有风帆、桨手、桅樯和彩旗;

喧闹的港口,在那里我的灵魂
大口地痛饮芳香、色彩和音响;
船只在黄金和闪光绸中行进,
张开它们巨大的手臂来亲吻
那颤动着炎热的晴空的荣光。

我要将我那酷爱陶醉的脑袋,
埋进这海套着海的黑色大洋,
我微妙的精神,有船摇的抚爱,
将再度找到你,哦丰饶的倦怠!
香气袭人之闲散的无尽摇荡!

蓝色的头发,黑夜张起的穹庐
你为我让天空变得浑圆深广,
在你那头发的岸边绒毛细细,
我狂热地陶醉于混合的香气,
它们发自椰子油、柏油和麝香。

长久!永远!你的头发又密又稠,
我的手把红蓝宝石、珍珠播种,
为了让你永不拒绝我的欲求!
你可是令我神游的一块绿洲?
让我大口地吮吸回忆之酒的瓶?

郭宏安译


La destruction 毁灭

La destruction

Sans cesse à mes côtés s'agite le Démon ;
Il nage autour de moi comme un air impalpable ;
Je l'avale et le sens qui brûle mon poumon
Et l'emplit d'un désir éternel et coupable.

Parfois il prend, sachant mon grand amour de l'Art,
La forme de la plus séduisante des femmes,
Et, sous de spécieux prétextes de cafard,
Accoutume ma lèvre à des philtres infâmes.

Il me conduit ainsi, loin du regard de Dieu,
Haletant et brisé de fatigue, au milieu
Des plaines de l'Ennui, profondes et désertes,

Et jette dans mes yeux pleins de confusion
Des vêtements souillés, des blessures ouvertes,
Et l'appareil sanglant de la Destruction !

毁灭

魔鬼不停地在我的身旁蠢动,
像摸不着的空气在周围荡漾;
我把它吞下,胸膛里阵阵灼痛,
还充满了永恒的、罪恶的欲望。

它知道我酷爱艺术,有的时候
就化作了女人最是妩媚妖娆,
并且以虚伪作为动听的借口,
使我的嘴唇习惯下流的春药。

就这样使我远离上帝的视野,
并把疲惫不堪、气喘吁吁的我
带进了幽深荒芜的厌倦之原,

在我的充满了混乱的眼睛里
扔进张口的创伤、肮脏的衣裳,
还有那“毁灭”的器具鲜血淋漓! 


Harmonie du soir 黄昏的和谐

Harmonie du soir

Voici venir les temps où vibrant sur sa tige
Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir ;
Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !

Chaque fleur s'évapore ainsi qu'un encensoir ;
Le violon frémit comme un coeur qu'on afflige ;
Valse mélancolique et langoureux vertige !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir.

Le violon frémit comme un coeur qu'on afflige,
Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir !
Le ciel est triste et beau comme un grand reposoir ;
Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige.

Un coeur tendre, qui hait le néant vaste et noir,
Du passé lumineux recueille tout vestige !
Le soleil s'est noyé dans son sang qui se fige...
Ton souvenir en moi luit comme un ostensoir !

黄昏的和谐

那时候到了,花儿在枝头颤震,
每一朵都似香炉散发着芬芳;
声音和香气都在晚风中飘荡;
忧郁的圆舞曲,懒洋洋的眩晕!

每一朵都似香炉散发着芬芳;
小提琴幽幽咽咽如受伤的心;
忧郁的圆舞曲,懒洋洋的眩晕!
天空又悲又美,像大祭台一样。

小提琴幽幽咽咽如受伤的心;
温柔的心,憎恶广而黑的死亡!
天空又悲又美,像大祭台一样。
太阳在自己的凝血之中下沉。

温柔的心,憎恶广而黑的死亡!
收纳着光辉往昔的一切遗痕!
太阳在自己的凝血之中下沉。
想起你就仿佛看见圣体发光!

郭宏安译


Paysage 风景

Paysage

Je veux, pour composer chastement mes églogues,
Coucher auprès du ciel, comme les astrologues,
Et, voisin des clochers, écouter en rêvant
Leurs hymnes solennels emportés par le vent.
Les deux mains au menton, du haut de ma mansarde,
Je verrai l'atelier qui chante et qui bavarde ;
Les tuyaux, les clochers, ces mâts de la cité,
Et les grands ciels qui font rêver d'éternité.

Il est doux, à travers les brumes, de voir naître
L'étoile dans l'azur, la lampe à la fenêtre,
Les fleuves de charbon monter au firmament
Et la lune verser son pâle enchantement.
Je verrai les printemps, les étés, les automnes ;
Et quand viendra l'hiver aux neiges monotones,
Je fermerai partout portières et volets
Pour bâtir dans la nuit mes féeriques palais.
Alors je rêverai des horizons bleuâtres,
Des jardins, des jets d'eau pleurant dans les albâtres,
Des baisers, des oiseaux chantant soir et matin,
Et tout ce que l'Idylle a de plus enfantin.
L'Émeute, tempêtant vainement à ma vitre,
Ne fera pas lever mon front de mon pupitre ;
Car je serai plongé dans cette volupté
D'évoquer le Printemps avec ma volonté,
De tirer un soleil de mon coeur, et de faire
De mes pensers brûlants une tiède atmosphère.

风景

为了贞洁地作我的牧歌,我愿
躺在天堂身边,如占星家一般,
并以钟楼为邻,边做梦边谛听
风儿送来的庄严的赞美钟声。
两手托着下巴,从我的顶楼上,
我眺望着歌唱和闲谈的工场;
烟囱和钟楼,这些城市的桅杆,
还有那让人梦想永恒的苍天。

真惬意啊,透过沉沉雾霭观望
蓝天生出星斗,明窗露出灯光,
煤烟的江河高高地升上天外,
月亮洒下它令人着魔的苍白。
我还将观望春天、夏天和秋天;
当冬天带着单调的白雪出现,
我就到处都关好大门和窗户,
在黑暗中建造我仙境的华屋。
那时我将梦见泛青的地平线,
花园,在白石池中呜咽的喷泉,
亲吻,早晚都啁啾鸣唱的鸟雀,
以及牧歌当中最天真的一切。
暴乱徒然地在我的窗前怒吼,
不会让我从我的书桌上抬头;
因为我已然在快乐之中陶醉,
但凭我的意志就把春天唤醒,
并从我的心中拉出红日一轮,
将我的炽热的思想化作温馨。

郭宏安译


Bénédiction 祝福

Bénédiction

Lorsque, par un décret des puissances suprêmes,
Le Poète apparaît en ce monde ennuyé,
Sa mère épouvantée et pleine de blasphèmes
Crispe ses poings vers Dieu, qui la prend en pitié :

- " Ah ! que n'ai-je mis bas tout un noeud de vipères,
Plutôt que de nourrir cette dérision !
Maudite soit la nuit aux plaisirs éphémères
Où mon ventre a conçu mon expiation !

Puisque tu m'as choisie entre toutes les femmes
Pour être le dégoût de mon triste mari,
Et que je ne puis pas rejeter dans les flammes,
Comme un billet d'amour, ce monstre rabougri,

Je ferai rejaillir ta haine qui m'accable
Sur l'instrument maudit de tes méchancetés,
Et je tordrai si bien cet arbre misérable,
Qu'il ne pourra pousser ses boutons empestés ! "

Elle ravale ainsi l'écume de sa haine,
Et, ne comprenant pas les desseins éternels,
Elle-même prépare au fond de la Géhenne
Les bûchers consacrés aux crimes maternels.

Pourtant, sous la tutelle invisible d'un Ange,
L'Enfant déshérité s'enivre de soleil,
Et dans tout ce qu'il boit et dans tout ce qu'il mange
Retrouve l'ambroisie et le nectar vermeil.

Il joue avec le vent, cause avec le nuage,
Et s'enivre en chantant du chemin de la croix ;
Et l'Esprit qui le suit dans son pèlerinage
Pleure de le voir gai comme un oiseau des bois.

Tous ceux qu'il veut aimer l'observent avec crainte,
Ou bien, s'enhardissant de sa tranquillité,
Cherchent à qui saura lui tirer une plainte,
Et font sur lui l'essai de leur férocité.

Dans le pain et le vin destinés à sa bouche
Ils mêlent de la cendre avec d'impurs crachats ;
Avec hypocrisie ils jettent ce qu'il touche,
Et s'accusent d'avoir mis leurs pieds dans ses pas.

Sa femme va criant sur les places publiques :
" Puisqu'il me trouve assez belle pour m'adorer,
Je ferai le métier des idoles antiques,
Et comme elles je veux me faire redorer ;

Et je me soûlerai de nard, d'encens, de myrrhe,
De génuflexions, de viandes et de vins,
Pour savoir si je puis dans un coeur qui m'admire
Usurper en riant les hommages divins !

Et, quand je m'ennuierai de ces farces impies,
Je poserai sur lui ma frêle et forte main ;
Et mes ongles, pareils aux ongles des harpies,
Sauront jusqu'à son coeur se frayer un chemin.

Comme un tout jeune oiseau qui tremble et qui palpite,
J'arracherai ce coeur tout rouge de son sein,
Et, pour rassasier ma bête favorite,
Je le lui jetterai par terre avec dédain ! "

Vers le Ciel, où son oeil voit un trône splendide,
Le Poète serein lève ses bras pieux,
Et les vastes éclairs de son esprit lucide
Lui dérobent l'aspect des peuples furieux :

- " Soyez béni, mon Dieu, qui donnez la souffrance
Comme un divin remède à nos impuretés
Et comme la meilleure et la plus pure essence
Qui prépare les forts aux saintes voluptés !

Je sais que vous gardez une place au Poète
Dans les rangs bienheureux des saintes Légions,
Et que vous l'invitez à l'éternelle fête,
Des Trônes, des Vertus, des Dominations.

Je sais que la douleur est la noblesse unique
Où ne mordront jamais la terre et les enfers,
Et qu'il faut pour tresser ma couronne mystique
Imposer tous les temps et tous les univers.

Mais les bijoux perdus de l'antique Palmyre,
Les métaux inconnus, les perles de la mer,
Par votre main montés, ne pourraient pas suffire
A ce beau diadème éblouissant et clair ;

Car il ne sera fait que de pure lumière,
Puisée au foyer saint des rayons primitifs,
Et dont les yeux mortels, dans leur splendeur entière,
Ne sont que des miroirs obscurcis et plaintifs ! "

祝福

当诗人奉了最高权威的谕旨
出现在这充满了苦闷的世间,
他母亲,满怀着亵渎而且惊悸,
向那垂怜他的上帝拘着双拳:

——“呀!我宁可生一团蜿蜒的毒蛇,
也不情愿养一个这样的妖相!
我永远诅咒那霎时狂欢之夜,
那晚我肚里怀孕了我的孽障!

既然你把我从万千的女人中
选作我那可怜的丈夫的厌恶,
我又不能在那熊熊的火焰中
象情书般投下这诛儒的怪物,

我将使你那蹂躏着我的嫌憎
溅射在你的恶意的毒工具上,
我将拼命揉折这不祥的树身
使那病瘵的蓓蕾再不能开放!

这样,她咽下了她怨毒的唾沫,
而且,懵懵然于那永恒的使命,
她为自己在地狱深处准备着
那专为母罪而设的酷烈火刑。

可是,受了神灵的冥冥的荫庇,
那被抛弃的婴儿陶醉着阳光,
无论在所饮或所食的一切里,
都尝到那神膏和胭脂的仙酿。

他和天风游戏,又和流云对话,
在十字架路上醺醺地歌唱,
那护他的天使也禁不住流涕
见他开心得象林中小鸟一样。

他想爱的人见他都怀着惧心,
不然就忿恨着他那么样冷静,
看谁能够把他榨出一声呻吟,
在他身上试验着他们的残忍。

在他那份内应得的酒和饭里,
他们把灰和不洁的唾涎混进;
虚伪地扔掉他所摸过的东西,
又骂自己把脚踏着他的踪印。

他的女人跑到公共场上大喊:
“既然他觉得我美丽值得崇拜,
我要仿效那古代偶像的榜样;
象它们,我要全身通镀起金末。

我要饱餐那松香,没药和温馨,
以及跪叩,肥肉,和香喷喷的酒,
看我能否把那对种灵的崇敬
笑着在这羡慕我的心里僭受。

我将在他身上搁这纤劲的手
当我腻了这些不虔敬的把戏;
我锋利的指甲,象只凶猛的鹫,
将会劈开条血路直透他心里。

我将从他胸内挖出这颗红心,
象一只颤栗而且跳动的小鸟,
我将带着轻蔑把它往地下扔
认我那宠爱的畜牲吃一顿饱!”

定睛望着那宝座辉煌的天上,
诗人宁静地高举度数虔敬的双臂,
他那明慧的心灵的万丈光芒
把怒众的狰狞面目完全掩蔽:

——“我祝福你,上帝,你赐我们苦难
当作洗涤我们的罪污的圣药,
又当作至真至纯的灵芝仙丹
修炼强者去享受那天都极乐!

我知道你为诗人留一个位置
在那些圣徒们幸福的行列中,
我知道你邀请他去躬自参预
那宝座,德行和统治以至无穷。

我知道痛苦是人的唯一贵显
永远超脱地狱和人间的侵害,
而且,为要编织我的神秘冠冕,
应该受万世和万方顶礼膜拜。

可是古代“棕榈城”散逸的珍饰,
不知名的纯金,和海底的夜光,
纵使你亲手采来,也不够编织
这庄严的冠冕,璀璨而且辉煌,

因为,它的真体只是一片银焰
汲自太初的晶莹昭朗的大星:
人间凡夫的眼,无论怎样光艳,
不过是些黯淡和凄凉的反映!”

梁宗岱 译


Chant d'automne 秋歌

Chant d'automne

I

Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres ;
Adieu, vive clarté de nos étés trop courts !
J'entends déjà tomber avec des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le pavé des cours.

Tout l'hiver va rentrer dans mon être : colère,
Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon coeur ne sera plus qu'un bloc rouge et glacé.

J'écoute en frémissant chaque bûche qui tombe ;
L'échafaud qu'on bâtit n'a pas d'écho plus sourd.
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.

Il me semble, bercé par ce choc monotone,
Qu'on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.
Pour qui ? - C'était hier l'été ; voici l'automne !
Ce bruit mystérieux sonne comme un départ.

II

J'aime de vos longs yeux la lumière verdâtre,
Douce beauté, mais tout aujourd'hui m'est amer,
Et rien, ni votre amour, ni le boudoir, ni l'âtre,
Ne me vaut le soleil rayonnant sur la mer.

Et pourtant aimez-moi, tendre coeur ! soyez mère,
Même pour un ingrat, même pour un méchant ;
Amante ou soeur, soyez la douceur éphémère
D'un glorieux automne ou d'un soleil couchant.

Courte tâche ! La tombe attend ; elle est avide !
Ah ! laissez-moi, mon front posé sur vos genoux,
Goûter, en regrettant l'été blanc et torride,
De l'arrière-saison le rayon jaune et doux !

秋歌

一

不久我们将沦入森冷的黑暗;
再会罢,太短促的夏天的骄阳!
我已经听见,带着惨怆的震撼,
枯木槭槭地落在庭院的阶上。

整个冬天将窜入我的身;怨毒,
恼怒,寒噤,恐怖,惩役与苦工;
像寒日在北极的冰窖里瑟缩,
我的心只是一块冰冷的红冻。

我战兢地听每条残枝的倾坠;
建筑刑台的回响也难更喑哑。
我的心灵像一座城楼的崩溃,
在撞角的沉重迫切的冲击下。

我听见,给这单调的震撼所摇,
仿佛有人在勿促地钉着棺材。
为谁呀?——昨儿是夏天;秋又来了!
这神秘声响像是急迫的相催。

二

我爱你的修眼里的碧辉,爱人,
可是今天什么我都觉得凄凉,
无论你的闺房,你的爱和炉温
都抵不过那海上太阳的金光。

可是,还是爱我罢,温婉的心呵!
像母亲般,即使对逆子或坏人;
请赐我,情人或妹妹呵,那晚霞
或光荣的秋天的瞬息的温存。

不过一瞬!坟墓等着!它多贪婪!
唉!让我,把额头放在你的膝上,
一壁惋惜那炎夏白热的璀璨,
细细尝着这晚秋黄色的柔光!

(梁宗岱译)


Parfum exotique 异域的芳香

Parfum exotique

Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d'automne,
Je respire l'odeur de ton sein chaleureux,
Je vois se dérouler des rivages heureux
Qu'éblouissent les feux d'un soleil monotone ;

Une île paresseuse où la nature donne
Des arbres singuliers et des fruits savoureux ;
Des hommes dont le corps est mince et vigoureux,
Et des femmes dont l'oeil par sa franchise étonne.

Guidé par ton odeur vers de charmants climats,
Je vois un port rempli de voiles et de mâts
Encor tout fatigués par la vague marine,

Pendant que le parfum des verts tamariniers,
Qui circule dans l'air et m'enfle la narine,
Se mêle dans mon âme au chant des mariniers.

异域的芳香

一个闷热的秋夜,我合上双眼,
呼吸着你滚烫的胸脯的芳香,
我看见幸福的海岸伸向远方,
单调的阳光照得它神迷目眩;

一座慵懒的岛,大自然奉献出
奇特的树木,美味可口的果品,
身材修长和四肢强健的男人,
还有目光坦白得惊人的女子。

被你的芳香引向迷人的地方,
我看见一个港,满是风帆桅樯,
都还颠簸在大海的波浪之中,

同时那绿色的罗望子的芬芳——
在空中浮动又充塞我的鼻孔,
在我的心中和入水手的歌唱。

郭宏安译


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